La famille Vargas a généreusement accepté de partager à notre communauté chrétienne de Limoilou son témoignage de vie chrétienne, d’intégration au Québec ainsi que dans notre milieu ecclésial. Ainsi, ce premier témoignage d’une série de plusieurs autres vise à mettre en évidence la diversité de notre communauté chrétienne qui est en même temps représentatif de la réalité de la population de Limoilou. Cela vise à nous sensibiliser sur la catholicité de l’Église, sur notre projet pastoral (« Au cœur de Limoilou, Accueillir comme le Christ »), etc.
Une immigration au Canada dans un contexte politique difficile
Mme Maria Vargas est arrivée du Guatemala en août 2007 avec ses parents (Santiago et Maria Aura) ainsi que ses deux enfants David et Luis qui avaient alors respectivement 5 et 3 ans. Cette immigration avec sa famille comme réfugiés politiques s’explique, dit-elle, par le fait que son époux fut assassiné dans le cadre de sa profession, car il était journaliste et s’intéressait beaucoup à la politique. Ainsi, sa vie et celles de ses proches furent en péril. Elle a dû supporter toute seule sa famille durant tout le processus d’immigration, pendant la période d’installation et d’intégration dès leur arrivée dans la ville de Québec. En effet, Mme Vargas a effectué sa francisation durant environ neuf mois à l’Université Laval de 8h à 15h ainsi que six mois, de 8h à 15h, au Centre Louis Joliette afin d’obtenir son « Français Secondaire 5 ». Aussi, elle devait s’occuper de David et Luis ainsi que de ses parents. Elle se déplaçait souvent, dit-elle, avec son dictionnaire de français à tous ses rendez-vous pour pouvoir trouver des mots justes afin de se faire comprendre. Par ailleurs, aucun membre de a famille ne parlait le français à ce moment, ce qui rendait très difficile le quotidien. Après sa francisation, elle a obtenu une équivalence de DEC en secrétariat. Au Guatemala, elle avait trois années d’études universitaires avec 13 ans d’ancienneté dans une institution gouvernementale.
Des acteurs du milieu, proactifs pour l’intégration de nouveaux arrivants à Limoilou
Le Centre Multiethnique de Québec (CMQ) a offert une aide très précieuse à la famille Vargas, notamment dans la plupart des premières démarches administratives, inscription des enfants à l’école, recherche de logement, etc., ainsi que pour l’inscription des enfants à l’école « Jeunes du monde ». La famille a habité près de l’église St-Pascal-de-Maizerets environ neuf années. Ce fut un hasard, mais providentiel. Le Centre Mgr Marcoux (CMM) très actif dans ce secteur de Limoilou lui a apporté un grand soutien pour ses premiers cours de français et c’est dans ce contexte qu’elle a rencontré Sr Suzanne Giguère (ainsi que Sr Madeleine) qui cordonnait les cours de français pour les immigrants dans ledit centre. Elle parlait à Mme Vargas lentement et avec des gestes. Elle a souligné cet aspect afin de montrer toute la délicatesse et l’attention particulière des religieuses (S.S.C.M.) dans leurs implications pour les nouveaux arrivants. Pendant que David était à l’école, elle prenait des cours de français tandis qu’une autre religieuse s’occupait de Luis qui était plus jeune. Pendant deux mois, elle a ainsi été accompagnée par ces religieuses avant d’aller à l’Université Laval pendant 9 mois pour sa francisation.
Une invitation à être davantage porteurs et porteuses de notre projet pastoral : « Au cœur de Limoilou, Accueillir comme le Christ »
Pour la famille Vargas, si l’accueil du Centre Multiethnique, du Centre Mgr Marcoux ainsi que le soutien des religieuses Servantes du Saint Cœur de Marie ont été essentiels dans son intégration à Limoilou, il en demeure que cela n’a pas été toujours facile de se faire une place ou de s’impliquer dans notre communauté chrétienne. Selon elle, en plus d’avoir vécu la barrière de la langue, il y a eu à certains égards un sentiment de méfiance. Au Guatemala, le grand-père de la famille, Santiago, était ministre extraordinaire de communion, Mme Maria était catéchète (préparation de confirmands) et leur souhait en s’installant à Limoilou fut alors de s’impliquer au sein de notre communauté. Ce reflet de la famille Vargas est une interpellation de la communauté chrétienne à être proactif, à aller à la rencontre des personnes qui fréquentent nos milieux plutôt que d’attendre qu’elles viennent à nous, à les interpeler au besoin, à discerner leurs charismes pour la communauté, à oser leur faire une place au sein de la communauté, à redécouvrir la catholicité de l’Église à travers l’accueil de la diversité et de la différence comme une richesse de l’Église.
La jeunesse et la réalité de l’accueil de la différence
David et Luis étudient actuellement au Collège François-de-Laval et disent que certains amis à l’école leur demandent souvent pourquoi leur famille a choisi le « grand froid » du Canada alors qu’il fait meilleur au Guatemala. Alors, David dit préférer ce « grand froid » à la guerre ou à l’insécurité due aux affaires politiques. De plus, David constate que les jeunes n’ont pas vraiment peur de la nouveauté, de la différence tandis que les adultes ont plusieurs préjugés. Selon lui, les jeunes sont souvent « non informés » ou ignorants. Ceux qui, parmi eux, manifestent de la fermeture envers les personnes venues d’ailleurs sont souvent influencés par des adultes, par ce qu’ils les entendent dire ou les voient faire, également par certains médias, etc.
La foi enracinée dans le Christ est un moyen sûr pour traverser les épreuves de la vie
Depuis le Guatemala, la famille a eu des bases solides au niveau de la foi chrétienne. C’est ce qui lui a permis de continuer la pratique religieuse malgré le choc culturel : façons de célébrer différentes, désaffection des églises au Québec, etc. Le Grand-Père (Santiago) a apporté avec lui une Bible en espagnol, des films catéchétiques, etc. Ainsi, lorsqu’à la messe il y a des choses qu’il n’a pas comprises, dès son retour à la maison, il regarde les traductions dans la Bible espagnole. Luis dit qu’il a grandi à Québec en étant édifié par la foi et la vie chrétienne de Santiago. En effet, alors qu’il ne parlait pas encore ni ne comprenait le français, il se levait tôt le matin pour enregistrer et suivre la messe en Espagnol à la télévision (câble). Par la suite, il se rendait à la messe dans une église locale. Ainsi, il était certain de pouvoir comprendre les textes du jour et mieux participer à l’Eucharistie.
Pour Mme Vargas, la foi de la famille a été davantage fortifiée avec le décès de son époux. C’est cette foi qui l’a soutenu et lui a permis de s’occuper de ses parents ainsi que de ses deux enfants. David quant à lui, appuie que ce sont toutes les opportunités que Dieu leur a données qui ont renforcé la foi de la famille :
- La rapidité de l’immigration
- L’aide du Centre multiethnique et Mgr Marcoux
- Le soutien des religieuses
David n’avait que 5 ans à ce moment, pourtant aujourd’hui, à l’âge de 15 ans, il s’en souvient encore et est plein de gratitude. Pour son petit-frère, Luis, l’expérience catéchétique à l’église St-Pascal a beaucoup contribué à la solidification de sa foi personnelle. Il a partagé que le parcours catéchétique vécu avec l’agente de pastorale, Danièle Delorme-Routhier, a été déterminant dans sa vie chrétienne.
Des suggestions de conseils en lien avec l’expérience personnelle de la famille Vargas
Pour David, il ne faut pas avoir peur de la nouveauté et toujours aller de l’avant. Selon Luis, il est essentiel de laisser les enfants aller à la messe et les impliquer dans les célébrations eucharistiques dominicales ou dans la vie de la communauté chrétienne. Nous sommes invités à faire comme Jésus, dit-il, c’est-à-dire à prendre les enfants par la main et les amener à Dieu. D’après Mme Vargas, la prière et la lecture des histoires saintes aux enfants, chaque soir, est un moyen pour faire grandir les enfants dans la vie chrétienne. Il faut, selon elle, parler aux enfants dès le bas-âge de Dieu et les impliquer par des gestes simples à la maison, en famille, et même dans des activités à l’église comme le service de la messe, etc. Finalement, les parents ont un rôle crucial à jouer pour la foi des enfants : leur parler de Dieu.
Mme Vargas travaille présentement à l’Hôtel-Dieu de Québec. David est au « Secondaire 3 » et joue dans l’équipe de football du collège François-de-Laval (FDL). Luis est quant à lui au « Secondaire 2 » et a également intégré l’équipe de football du collège FDL. Les grands-parents, Santiago et Maria Aura, sont les veilleurs de la famille au niveau de la vie spirituelle (prière, conseils, pratique religieuse, etc.). La famille Vargas est actuellement impliquée de diverses manières dans la communauté chrétienne de Limoilou.
Toute notre gratitude à la famille Vargas pour avoir spontanément accepté de partager son expérience d’immigration et témoigner de sa relation personnelle avec le Christ. Puisse ce témoignage encourager plusieurs membres de nos communautés qui connaissent le découragement, nous fortifier et nous « déranger » dans nos acquis tout en nous permettant d’être davantage acteurs et actrices de notre projet pastoral : « Au cœur de Limoilou, Accueillir comme le Christ ».
Propos recueillis par Léandre Syrieix, séminariste stagiaire.
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